BEST REGARDS FROM HELL //

Ses pattes foulent la Terre depuis trop longtemps pour qu’elle se souvienne depuis quand exactement ; longtemps, si longtemps –le pelage poussiéreux et les babines en sang.
Si longtemps qu’elle a oublié le ventre qui l’a enfantée.

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Sa réputation la précède, du profond des Enfers où elle a envoyé tant de gens jusqu’aux hauteurs de l’Olympe où l’on s’amuse comme on s’inquiète du trouble qu’elle amène avec elle.
Et puis il se présente à elle –le dieu du vin et de la folie. Il la fait tomber sous son pouvoir et l’envoie mener sa barbarie à sa place dans la cité de Thèbes où la folie la pousse à réclamer un enfant par mois sous peine de vider la cité entière de son sang.
Monstre incontrôlable –elle ne sait si elle prend véritablement goût à la terreur qu’elle inspire ou si la magie de Dionysos l’empêche d’y voir clair.

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S’en vint le chasseur Céphale et son fidèle Laelaps, chien d’Artémis qui ne manque jamais sa cible –voilà sa némésis. Le chien de chasse la pousse à quitter Thèbes, à s’enfuir loin, si loin, si longtemps, qu’elle en oublierai presque pourquoi elle détale dès qu’elle le voit ; instinct de survie.
Laelaps ; elle le hait comme elle l’aime car il est sa seule compagnie.

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La mascarade a assez duré ; cercle vicieux sans fin qu’est celui d’un chien infaillible aux trousses d’une renarde irrattrapable. D’un éclair, le maître du ciel y met un terme, et ce sont deux statues de pierre qui se côtoient pour les millénaires à venir.

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L’éternité minérale ; entre l’éveil et le néant, assez consciente pour voir le monde changer mais pas assez pour le comprendre, l’analyser –géante d’impuissance.
Et puis un jour, la pierre craque –ou bien sont-ce ses os ? La renarde est délivrée de sa malédiction par un miracle encore inconnu à ce jour et découvre devant elle un homme qui, malgré son odeur de mortel, dégage l’aura des divins. Demi-dieu au regard vicieux.
Il la veut pour lui tout seul –il les veut. Collectionneur, amateur de bêtes d’exceptions. Elle n’attends pas que Laelaps se réveille à son tour pour prendre la poudre d’escampette ; jamais prisonnière, jamais.

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Affaiblie par le poids de la malédiction de Zeus, elle trouve refuge à Ierótheón où elle se retrouve humaine pour la toute première fois. Désormais enfant sauvage, et non monstre sanglant, c’est de la compassion qu’elle voit dans le regard de ceux qui l’aident, l’habillent, la nourrissent et lui donnent un toit.
Et elle rayonne de cette nouvelle vie, si bien qu’on lui suggère un prénom quand elle avoue ne pas connaître le sien.

Solara est née.
La bête dort encore.