Le musée. Oh, musée ! Lieu d'art et de paix ; de richesse et de silence ; de savoir et de quiétude. Les vestiges de l'ancien monde regroupés dans ces sanctuaires publics, dont seuls les réels soucieux de cet univers étaient capables de déchiffrer les paroles, les images cachées sur chacune de ces toiles, chacune de ces sculptures, chacune de ces fresques. Ces inscriptions invisibles aux yeux mortels et ignares, racontant leur grande histoire, de leur création à leur survie jusqu'au siècle présent. Une certaine magie, aura de mystère et de connaissance envahissait chaque couloir et pièce du bâtiment, enivrant les personnes qu'ils jugeaient dignes de découvrir leurs épopées d'à travers les âges.

Margaret en faisant, sans grande surprise, bien évidemment partie : Les élus de ce savoir antique. C'était d'ailleurs la raison de sa venue aujourd'hui au musée du quartier ouest, venir décrypter un peu plus de textes et de scènes de ces trouvailles historiques. Un carnet fermement collé à elle et un crayon à papier dans une main, vêtue d'un chemiser blanc nacré et d'une veste fine et bleue marine ; une paire de lunettes ainsi que des centimètres en plus, et l'on aurait presque juré voir une sorte d'examinatrice, ou de professeure venue faire visiter le musée à sa classe d'élèves. Encore manquait-il la foule bruyante et rigolarde de jeunes à sa suite.

Elle avançait d'un pas vif entre les peintures de la Renaissance et ces restes de monuments antiques, tous exposés derrière des vitres de verre. Un vol ! Ne manquait-il plus que ça !

Pour elle-même, la demi-déesse soupira quand vint à ses oreilles les sons de bambins pleurant dans les bras de leurs parents ; mais ne pouvaient-ils pas être plus intelligents en n’amenant pas leur progéniture dans un tel endroit ? Le musée, le sanctuaire du silence et de la complexité des œuvres passées et présentes ! Pourquoi n'avait-elle pas le pouvoir de faire taire les autres, d'ailleurs ? Ce don aurait été fort utile dans sa vie. Adieu, remarques idiotes, cris de bébés, moralisateurs à deux sous, discours tellement ennuyant que si une corde avait été à proximité, Margaret ce serait ruée dessus.

C'était en faisant mine de ne rien entendre qu'elle fixa chaque œuvres apparaissant à ses yeux ; elle connaissait déjà leur histoire, la blonde avait tout tirer d'eux. Cherchant là où elle s'en était arrêté la dernière fois et son regard déviant les souvenirs matérialisés du passé, ses jambes s’arrêtèrent, comme mécaniquement. Statufiée sur place, se trouvait devant elle la dernière personne qu'elle aurait pensé et souhaité voir ici : Keith Imbécile Antxoritz.

Bon Dieu ! Pourquoi donc ce terrible inculte était là ? Que faisait-il ? Connaissant son parent divin, était-il venu pour voler une quelconque œuvre pour ensuite la détruire, ou la revendre au marché noir ? Pour, ne serait-ce avoir quelques sous en poche ? Un descendant d'Hermès fauché, cela faisait un bon mobile. Rien que la vue de cet homme lui hérissait sa chevelure blonde, resserrant sa prise sur son carnet et son crayon. Mais la fille d’Éris devait se ressaisir, ne pas paraître autant surprise que ce qu'elle affichait présentement. Forte, devait-elle être ; encore plus avec lui en face ! Un long soupir s'échappa de ses lèvres avant de relever les yeux vers le châtain, semblant regarder une sculpture. Quel amateur, il ne devait même pas comprendre toute la richesse qui s'émanait avec évidence de la statue !


— Pourquoi donc un ignare tel que toi se trouverait dans ce palais de connaissances ? Elle demanda d'un ton sec et supérieur. Serais-tu en train d'essayer de te cultiver ? Mais est-ce seulement possible ?


Toujours cette tonalité mauvaise qui était sa signature, comme un crachat de venin en pleine figure.

Elle grinça des dents en voyant cet index si proche de ce bijou de l'art grec ; qu'il ne le salisse pas de ce gros doigt gras et impure ! Quelque peu soulagée en le voyant se retirer, elle continua de fixer Keith avec cette même intensité, ce même jugement dans le regard, toujours aussi hautain. Cependant, une mimique d'agacement fit son apparition sur le front de la blonde ; Maggie ! Oh, qu'elle détestait que l'on appelle comme ça ! Enfin, seule sa famille encore en Angleterre en avait la pleine autorisation ; père Thomas, mère Angelina, grande sœur Gwendolyn et petit frère Alastair.

Une vague de souvenirs l'a traversa sans qu'elle n'en ait conscience. Oh, Gwen, cette rat de bibliothèque, et ce très cher Al, toujours prêt pour faire des bêtises ! Et enfin Maggie, la petite solitaire. Ce surnom lui rappelait bien trop sa famille, qu'elle avait dû malheureusement quittée pour venir vivre ici, à Ierótheón . . . Elle soupira pour reprendre une certaine consistance et faire de nouveau face au descendant d'Hermès.


— Et c'est toi qui me fait une remarque sur la politesse ? À d'autres !


Ah, ce sourire en coin ! Qu'est-ce qu'elle pouvait les haïr ! Margaret eu un mouvement de recul en voyant l'autre se planter devant elle, se préparant à se défendre en cas d'attaque. Et bien, quoi ! On ne savait jamais ; il fallait s'attendre à tout ! L’Anglaise croisa les bras sur sa poitrine en le sentant l'a détailler : Un pervers ! Il ne manquait plus que ça ! Décidément, ce gars-là, il accumulait tout ! La blonde aurait pu partir maintenant, c'était vrai . . . Mais elle se devait de répliquer, de ne pas fuir ! Elle n'était pas faible, et devait donc tenir !

Elle ne sut comment interpréter l'observation soudaine de Keith aux alentours, mais cela lui importa peu, au moins regardait-il ailleurs, c'était déjà ça ! Cependant, elle se figea à ses autres paroles : Elle, une belle plante ? Enfin, elle savait ce qu'il insinuait et qu'il n'était pas réellement en train de l'a traiter de végétale ! Encore heureux, d'ailleurs . . . Parce qu'une droite pouvait si vite arriver, et cela encore plus de la part de Margaret. Du moins, il n'avait pas tort : La jeune fille était belle, oui, elle-même le pensait sans grande humilité. Mais de la part de Keith ! Le Keith ! Cela changeait tout, et c'était assez perturbant.

La demi-déesse détourna la tête. Comment pouvait-elle répliquer ? Elle qui d’habitude avait toujours une réplique cinglante sous la manche, venait de se faire violemment boucler le bec ! Quelle honte, quelle faiblesse ! Allez, réfléchit ; ne le laisse pas avoir le dernier mot ! Pas cet abruti fini !


— Mpf ! Quelle répartie de sa part. Si ton but est de me flatter, tu te mets le doigt bien dans l’œil !


Oh, vraiment ? Pour dire vrai, elle avait apprécié le compliment, car cela ne se refuse jamais ; néanmoins, Margaret ne pouvait se résoudre de donner raison à cet idiot issu d'Hermès !

La blonde releva guère la plaisanterie gamine sur la douleur d'un doigt en plein dans un globe oculaire, et bon Dieu, heureusement qu'elle n'entendait pas ce qui se disait dans l'esprit de Keith ! Car une droite serait partie d'elle-même, direction son visage. Ou un peu plus bas, histoire de lui faire bien mal et de le plier en deux au sol ; et la demi-déesse aurait disposée au plus vite du musée, loin de ce dérangé ! Pourquoi donc sa mère n'avait-elle pas avortée de ce démon en personne ?

Encore un mouvement de recul, quand l'autre s'approcha une nouvelle fois d'elle, un peu trop près à son goût. Que voulait-il, à la fin ? S'avancer de plus en plus jusqu'à ce qu'elle ne chavire en arrière, au risque de blesser quelqu'un ou de détruire une des œuvres que protégeaient la bâtisse ? Attend la nuit et vient voler, ce sera plus rentable . . .

Les cheveux quelque peu hérissés, figée sur place, ses mains collées à ce qu'elle tenait dans les bras. Elle ne pouvait pas l'attaquer ou utiliser un de ses pouvoirs. Pourquoi ? Car dans les deux cas, il pourrait y avoir des dommages matériels, et Margaret ne voulait pas de sculpture fracassée ou de peinture déchirée par sa faute ! Elle se retint donc, endurant le supplice de Keith. Bien qu'une certaine envie de lui mettre un coup de pied bien placé l'a rongeait de toutes parts, soyez-en certains ! Mais il y avait la fuite ; pourquoi ne l'a prenait-elle pas ? Pour son honneur ? Parce que sinon, le descendant allait probablement l'a charrier encore plus ? Un peu des deux, très sûrement.

Un regard noir en direction du châtain se fit voir quand il toucha à une des mèches de cheveux de la fille d’Éris, continuant, pour son plus grand malheur, de l'écouter baragouiner. Offuscation ! Il avait beau être idiot, c'était un fait avéré par la demoiselle en question, mais de là à penser qu'il était son type, il avait dû se faire bercer un peu trop près du mur ! Quelle mauvaise mère inconsciente avait-il eu, vraiment !


— Ah ! Désolé de te décevoir, mais pour ta gouverne, je ne suis pas attiré par les gens dans ton genre. Et crois-moi, je suis bien soulagée d'entendre que tu ne t’intéresses pas à moi !


Aucun commentaire sur le "gamine" ; elle n'avait pas envie d'user de sa salive pour répondre à cette grotesque insulte. Cependant, elle fût heureuse de constater que Keith s'éloignait ; joie qui fût emportée par ce sourire. Qu'il pouvait en avoir des désagréables, cet imbécile aux pieds ailés !

Une nouvelle mimique d'énervement apparu sur son front quand il l'a rabaissa, encore. Il avait beau être plus âgé, elle restait la plus mature des deux ! Selon elle, du moins ; et l'Anglaise avait toujours raison. Un long soupir s’échappa ; Margaret décida de ne plus rebondir sur ces âneries, à quoi bon, sérieusement ? Cela n'était que de la perte de temps !


— J'engage des discussions avec les souvenirs présents dans ce musée ; je n'attend pas de toi à ce que tu comprennes.


Elle regarda vaguement la statue, faisant guère attention à son postérieur de marbre.

Elle pris un air outré en l’entendant parler ; des cailloux ? Des vieilles croûtes de peinture ? Comment cet inculte, sans aucune sensibilité artistique, osait-il ainsi parler de ces œuvres millénaires ? Mais que faisait-il donc au musée ! Il faisait tache, parmi toutes ces pures sculptures de marbre et de cuivre, et ces toiles héroïques, certaines représentant des scènes de la mythologie grecque. Ah ! Certains enfants et descendant devaient être fiers de voir des représentions de leur parent ou ancêtre, ici !

Le choc s'empara de nouveau de la blonde : Mais qu'on le fasse taire ! Pourquoi ? Pourquoi cela devait être elle, qui devait subir autant d'ignorance et de stupidité ? Qu'avait-elle fait pour mériter un tel châtiment ? Était-ce une malédiction divine ? Ne voulant passer par quatre chemins, elle énuméra, les épaules relevées, comme si elle était crispée :


— Premièrement, nomme ces "cailloux", comme tu dis, comme nous les appelons ici : Des œuvres. Deuxièmement, ose encore une fois m'appeler Maggie et je te ferais regretter cet acte. Et troisièmement, si quelqu'un ici devait consommer de la drogue, ce ne serait pas moi.


Ses épaules retombèrent quand elle termina. Cette langue de vipère, chargée à bloc en venin mortel, encore et toujours ! Margaret ne voulait pas perdre son temps à expliquer plus en détail le fond de sa pensée, car en plus de ne pas en avoir l'envie, elle était persuadée que l'autre voleur n'allait rien comprendre, et que son pauvre cerveau n'y survivrait pas ! L'Anglaise entraperçu cette grimace inhabituelle sur le visage de Keith, avant qu'il ne reprenne son fameux sourire que la blonde détestait tant. Ce fut au tour de la demi-déesse de tordre le visage : Pardon ? Avait-elle bien entendu ? Ou bien les bêtises du châtain lui faisait croire des choses plus idiotes encore ? Déjà, étant une associable de base, la compagnie de quelqu'un l'a dérangeait, sauf dans des cas particuliers. Alors celle de ce démon ! Oui, elle préférerait largement une croisière sur le Styx !


— Ta compagnie est plus une malédiction qu'autre chose !


Fut ce qu'elle lui lâcha. Et c'était vrai : Quelqu'un avait dû la maudire pour qu'elle se fasse autant coller par un imbécile pareil !