Kalysta était de garde aux alentours de la ville cette nuit-là. Elle aimait faire des rondes à l’extérieur de la ville car il y avait beaucoup moins de chance d’avoir à arrêter quelqu’un et elle pouvait profiter de la nature ainsi que converser avec les diverses créatures qui habitaient ici. C’était paisible et reposant bien qu’elle soit de garde. C’était tout le contraire de ce qu’il se passait quand elle était en ville, elle passait son temps à arrêter des voyous ou bien à retrouver des individus en état d’ébriété. La jeune femme avait l’impression d’être une sorte de baby-sitter qui prenaient de méchants enfants sur le fait et ensuite les mettait au coin pour quelques heures avant qu’ils ne soient relâchés. C’était une tâche pénible et sans fin. Sans parler d’un certain voyou au nom absolument imprononçable qui passait son temps à lui pourrir la vie (elle était certaine qu’il le faisait exprès) et qui allait lui donner des cheveux blancs avant l’heure. Mais inutile de penser à tout cela pour le moment. Il fallait profiter de ces nuits où elle se trouvait dans la nature.

Elle fit sa ronde autour des temples de Déméter et d’Artémis, continua son chemin sur une partie des champs et ensuite se dirigea vers la forêt. Elle ne s’aventurait jamais bien loin là-dedans car seul ceux qui y habitaient savaient s’y repérer et Kalysta ne connaissait pas assez bien les lieux pour s’y promener en toute tranquillité. Heureusement les locaux n’avaient aucune animosité envers elle et coopéraient volontiers en général ce qui faisait qu’elle pouvait faire sont travail sans aucun soucis en plus d’entretenir de bonnes relations avec les créatures de la forêt. Il était plus simple de parler avec eux qu’avec les humains d’une certaine manière, cela ne changeait tout de même pas le fait qu’elle n’était pas des plus sociable et hormis pour le travail ne savait guère faire la conversation.
Avoir de bonnes relations avec les créatures ne pouvait être qu’un plus pour elle alors la jeune femme espérait que cela continue.

Kalysta entendait déjà de la musique en se rapprochant de la forêt et elle se doutait qu’un satyre devait être en train de jouer, peut-être une de ses connaissances qui sait. Elle pénétra dans la masse d’arbres et suivit le son de la musique pour en trouver l’origine tout en faisant bien attention où elle allait, ce serait bête de se perdre parce qu’elle ne faisait pas attention au chemin.
Le joueur de musique était bien quelqu’un qu’elle connaissait, un satyre du nom de Reginald Oak, il était très aimable et plutôt adorable selon Kalysta. En fait à bien y réfléchir c’était peut-être même le seul homme décent de son entourage dans sa tranche d’âge, ce qui n’était pas vraiment réjouissant. Elle attendit qu’il finisse son morceau avant de le saluer.

«  Bonsoir Reginald, est-ce que tout va bien ici ? Rien d’anormal ou d’inhabituel ?  »

Le ton de Kalysta était loin d’être gentil ou aimable, il était sec et assez dur mais on pouvait tout de même comprendre qu’elle ne cherchait qu’à converser normalement. Certains soldats étaient plus aimable que d’autres quand ils parlaient aux habitants, pour Kalysta elle se devait de garder une certaine prestance et apparence à chaque fois qu’elle travaillait ou sinon personne ne l’écouterait ni de la prendrait au sérieux.  

« Bonsoir mademoiselle Kalysta ! » Ah que ces mots sonnaient doux à son oreille. Une salutation respectueuse, simple et qui pourtant manquait beaucoup dans la vie de la jeune femme. Elle avait malheureusement affaire à des individus au comportement reprochable bien trop souvent et de simple formules de politesse comme celle-ci lui manquait cruellement. Cela changeait des « Hey, salut ma belle ! » ou des « Bonjour beauté, te voir éclaire ma journée. » ou encore « Coucou ma mignonne. » qui lui donnait cruellement envie de fracasser le crâne de la personne qui prononçait ses mots. Mais bien évidement elle ne pouvait se montrer violente envers les civils ainsi alors elle prenait sur elle, encore et toujours. Un jour elle allait sûrement exploser sous toute cette pression, se défouler après le travail était une chose mais le fait qu’un certain individu était complètement insensible à tout ce qu’elle pouvait lui dire ne l’aidait pas à décompresser.
Stop. Elle avait dit qu’elle ne penserait plus à lui. Pas ce soir.

Reginald n’avait rien vu d’anormal dans les environs pour le moment, très bien. Elle lui fit un signe de tête pour lui dire qu’elle avait bien reçu ce qu’il venait de lui dire et elle décida de s’arrêter ici un petit instant. La jeune femme ne savait pas faire la conversation mais elle devait s’entraîner, on attendait d’elle qu’elle sache le faire si elle voulait grimper les échelons, et il valait mieux risquer d’échouer et de se ridiculiser avec des personnes qui n’auront aucune incidence majeur sur sa carrière. Cela ne rendait cependant pas la chose plus simple. Que devait-elle dire ? Elle songea à ce que diverses personnes de son entourage pourraient lui dire. Son supérieur ne faisait que lui donner ses ordres, ses collègues n’étaient pas très bavard non plus, les personnes qu’elle interceptait ne valait pas la peine que l’on se souvienne de leur mots, ne restait que ses parents.

«  Le ciel étoilé est vraiment magnifique.  »

Ça avait l’air tellement ridicule comme remarque mais c’était bien le genre de chose que disaient ses parents et ça n’avait pas l’air ridicule quand ils le faisaient, alors peut-être qu’elle ne se ridiculiserait pas tant que ça ? Et pour renforcer ses dires, elle sortit son appareil photo (polaroid) afin de prendre un cliché de ce magnifique ciel pour en garder un souvenir. Kalysta regarda la photo une fois ressortit et elle était plutôt réussite, elle l’accrocherait à son mur dans sa chambre avec les autres clichés qu’elle jugeait digne d’intérêt.   

Kalysta sortit une petite pochette d’une de ses poches et y glissa le cliché qu’elle venait de prendre, il serait dommage de l’abîmer avant qu’elle ne puisse l’accrocher à son mur. Une fois cela fait elle se prit à regarder de nouveau le ciel nocturne. Elle aimait voir les étoiles, il y avait quelque chose de très reposant dans ce ciel noir illuminé seulement par une multitudes de points lumineux. Elle ne pouvait voir le ciel ainsi quand elle était encore en ville, il y avait trop de pollution pour vraiment admirer les étoiles mais depuis qu’elle était à Ierótheón elle avait chaque nuit une vue resplendissante. Le ciel nocturne était aussi une vision de souffrance pour la jeune soldate, un rappel de toutes ces nuits passés à la rue, la faim au ventre et le corps couvert de blessures, ces nuits à se demander si elle allait voir le soleil se lever le lendemain. La jeune femme chassa ces pensées de son esprit, elle ne voulait pas y repenser, c’était encore douloureux même si il y avait très peu de chance pour qu’elle se retrouve de nouveau dans une telle situation.

«  Je crains de ne guère m’y connaître en constellations.  »

Ce qui était fort dommage. Cela pourrait lui être très utile pour se repérer la nuit si jamais elle venait à avoir une mission en dehors de la ville.  Elle devrait songer à en apprendre plus sur le sujet quand elle aurait un moment de libre. Ou elle pourrait tout simplement demander au satyre mais avait-il ne serait-ce que le temps et l’envie de faire cela ? Et elle ne pouvait lui faire une telle demande quand elle était en service, Reginald pourrait se méprendre et se croire obliger de le faire.

«  Elle s’est plutôt bien passée, merci, et la vôtre ?  »

Étant de service la nuit elle avait eut la journée de libre et n’avait pas eu à s’occuper de la racaille d’Ierótheón ce qui était fort agréable.